Tout le monde sait combien est difficile de soigner les proches, notamment sa maman… avec la singularité pour moi d’être celle de coeur, d’adoption.
A son retour d’hospitalisation sur une intervention digestive, maman proche de 80 ans, beaucoup d’antécédents, dont la maladie d’Alzheimer, est dans un sale état, victime de multiples défaillances et erreurs médicales, les bras m’en tombent de ce nouveau constat.
Quand il s’agit de proches, on a juste envie de tout péter, tellement ça prend aux tripes, surtout quand on connaît l’envers du décor. J’ai de nouveau l’impression d’être enfermée dans un bocal… j’ai envie de hurler ma rage !!
Cerise sur le gâteau : la surprise de découvrir une stomie, une intervention qui n’a pas été celle prévue initialement. Aucune information !! Par téléphone : « vous allez recevoir le compte-rendu ou vous pouvez venir le chercher au secrétariat dans 2 semaines. »
Pour n’en citer que quelques-unes :
– embolie pulmonaire (pas d’anticoagulant en prévention chez une personne alitée ayant déjà eu des phlébites),
– insuffisance rénale parce que les pertes digestives n’ont pas été compensées d’où la déshydratation (pas de courrier de sortie, ni de compte rendu-médical).
– matériel de colostomie inadapté, donc hurlements de douleur parce que les plaies sont à vif et que les selles qui fuitent constamment du matériel inadapté brûlent la peau. Heureusement j’ai du relationnel qui peut m’aider à distance grâce aux photos envoyées par téléphone!! Merci au collègue stomathérapeute et à la commerciale de laboratoire. L’histoire de matériel est réglé au bout de 2 jours malgré le we.
Du coup hospitalisée en urgences.
– surdosage en morphine ayant généré des crises convulsives. Il ne figurera pas dans le compte-rendu médical. CQFD, la jeune infirmière qui a posé TOUTES les perfusettes d’antalgique en même temps parce que c’était prescrit et qui se fait tirer les oreilles par l’ancienne de service. Oui, il faut espacer les prises d’antalgique quelque soit le mode de prise. Dommage, le mal est fait !!
– prise au bloc opératoire en urgence pour évacuer un hématome suite à une chute et transfusée dans la foulée. Ah, elle a chuté?, non ce n’était rien du tout… Hum… no comment !!
– … liste non exhaustive.
Pour moi, maman n’allait pas passer le we, j’avais prévenu mon frère cadet, lui précisant de préparer les vêtements…
Je réalise le soin à distance dans ces conditions (800km nous sépare), désespérée… qu’on abrège au moins ses souffrances !!
Le paradoxe violent d’être soignante, portée sur le bien-être, ayant un parcours professionnel brillant, vivre ce cauchemar est surréaliste et juste pas possible que ce soit pour ma mère, ou pour toute autre personne.
Je pose le rituel habituel et il y a de nombreuses présences autour d’elle, tout est blanc. Des anges, des gardiens sont tout autour d’elle, un filet est posé comme un voile, un grand champ opératoire et les êtres s’activent… J’assiste à une opération divine, sans trop savoir exactement ce qui se passe !!
Je suis scotchée, c’est la 2e fois que j’assiste à ce genre de phénomène. C’est indescriptible, intense, surréaliste… Le temps s’est arrêté, les larmes coulent… Je remercie !! La lumière restera ainsi plusieurs jours sur elle.
J’entends la consigne que
je ne peux plus pratiquer de soins sur maman, je dois la laisser s’en remettre au Ciel.
Mes larmes redoublent… Je me sens dévastée, pourquoi ce « don », ce potentiel de soigner l’autre si ce n’est pas pour mes proches, pour elle ?!
Avec le recul c’est en fait une belle leçon : je ne suis rien et je dois faire confiance à quelque chose de plus grand. C’est avoir la foi quoiqu’il advienne. J’accepte ce qui m’est demandé parce que j’ai compris que je n’ai pas le droit d’aller au-delà, que cela ne servirait à rien et me mettrait en danger également.
Maman est toujours de ce monde, elle fait régulièrement des séjours à l’hôpital ; c’est un cas complexe et la médecine moderne a ses limites. Elle est âgée aussi, dans une société qui fait peu l’éloge de la vieillesse. Elle revient de loin, de très loin…
Là je peux comprendre que je passe du stade de « folle-klorique » à « folle » tout court aux yeux de la majorité de personnes sensées et rationnelles.
Avec le temps, je sais que je serai amener à requestionner la consigne qui m’a été donnée il y a 5ans, quand le moment sera venu… Rien n’est figé, tout est mouvement, c’est le principe de la Vie !!
Elle et papa sont inscrits avec leur consentement à des séances régulières de soin collectif auxquelles je participe.
NB :
Je ne sais pas comment mon entourage et ma famille perçoivent ce que je fais et pratique, ni même qui je suis ; j’ai eu une éducation très cartésienne. Je suis en paix avec ce que je suis. Je les aime et les accepte eux comme ils sont.