Je suis infirmière en poste d’après-midi et un patient ne fait que sonner. Ça promet d’être un chouette après-midi!!
Je vais le voir, il tremble à en faire trembler son lit avec une bruit de ferraille qui cogne contre le mur.
C’est impressionnant mais plutôt théâtral car je ne perçois pas de situation d’urgence malgré tout. Il me dit qu’il a beaucoup mal au dos et aux jambes. Le visage est fermé et il est hyper crispé de la tête aux pieds. Je lui prends les paramètres (tension artérielle, pouls, température et saturation), tout est correct. Je le questionne sur le type de douleurs ressenties (localisation, survenue, intensité, durée…). Le « DU de prise en charge de la douleur par les professionnels de santé » m’est très utile dans ces moments là.
Je reste sur ma première impression. Mon secteur est plutôt calme, une chance rarissime, je décide donc de prendre du temps à ses côtés et je m’assois au bord du lit pour entamer la discussion.
Curieuse, je m’informe sur l’histoire de sa vie. Il est agriculteur, marié avec des enfants. Forcément l’hospitalisation signifie que ses affaires sont laissées à l’abandon, ce qui n’est pas pour plaire aux banquiers, donc des soucis d’ordre matériel que j’imagine aisément.
Les tremblements ont cessé.
Je me hasarde à lui parler de mes différentes facettes en tant que soignante et lui propose une séance de massage des pieds. Il accepte contre toute attente.
Il se détend de plus en plus jusqu’à s’assoupir. J’ai finalement massé aussi la tête, pas évident entre la tête de lit et la potence… Je le laisse dans cet état, satisfaite. Il n’a pas re-sonné depuis.
Je reprends le travail le surlendemain.
Je n’ai pas le même secteur en charge, aussi je questionne ma collègue et j’apprends qu’il est sortant le jour même… Youpi !! Je lis dans les transmissions qu’il n’y a pas eu d’autres plaintes de douleurs depuis l’épisode « tremblements ».
Je décide de lui faire un « coucou », toque à sa porte et entre. Je partage avec lui la joie de son départ que je viens d’apprendre. Je lui demande comment il va, il est ravi de se sentir bien et je le sens toujours détendu.
Il me serre chaleureusement la main pour me remercier tout en me regardant dans les yeux. Je lis dans son regard toute sa reconnaissance qui me fait chaud au coeur…
NB :
J’accorde beaucoup d’importance au relationnel qui pour moi constitue un soin à part entière. Il suffit parfois à lui seul pour répondre à un besoin non exprimé verbalement mais par le corps (ici les tremblements) et évite parfois la prise de médicament quand cela n’est pas nécessaire.
J’insiste souvent sur la poursuite du suivi médical qui reste indispensable dans toute prise en charge, surtout quand la personne ne semble pas observante. Il m’arrive d’adresser des compte-rendus de suivi au médecin traitant ou spécialiste.
Je pense qu’il est indispensable de travailler en collaboration et pluridisciplinarité tout simplement parce que les points de vue complémentaires enrichissent la qualité de la prise en charge.